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La Couleuvre

Silencieuse et sinueuse,
Lente à dérouler ses anneaux,
Elle se coule, paresseuse,
Sur la margelle au bord de l’eau.

Là, elle mire à la surface
Etale et noire du bassin,
Tout en se pavanant, sa face.
Coquette ? Mais à dessein.

Car, elle guette, la maligne,
Le sot poisson qui osera
Se prendre aux crochets de sa ligne.
Le sot, qu’elle dévorera !

Puis, lovée sur la pierre plate,
Ivre du soleil méridien,
Goûte une digestion béate,
Sans clore son œil reptilien.

Toi, qui tords avec élégance
Ton fouet, d’or et vert lumineux,
Pourquoi, dans leur extravagance
Les hommes te sont-ils haineux ?

Toi, l’innocente Mélusine
Qu’ils accablent de tous leurs maux,
Parce qu’une lointaine cousine
Avec leur aïeul eut des mots !

Elle lui offrait la connaissance !
Que pouvait-il avoir de mieux ?
« Tout savoir ? Mais quelle impudence !
Tout savoir ? Tout ? Seul le peut Dieu !
 
Tes semblables iront sans pattes,
Maudits par l’homme à tout jamais,
Et toi, l’épouse indélicate,
Dans l’ignorance désormais ! »

Ignorante ? Oui, Eve le fut ;
De même en alla pour ses filles ;
C’est du moins ce qu’Adam a cru ;
Mais les nuits où la lune brille,

Mille et cent langues vipérines
Disent aux femmes à minuit
Le secret de nos origines.
Bah ! ...Il est oublié à midi!

Michèle Puel Benoit

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